Le poltergeist de Chapendu – Raddon-et-Chapendu (70)

Voici une histoire vraie, qui n’a interpellé personne dans la presse écrite à l’époque et dont l’investigation a été particulièrement difficile. Nous nous sommes servi de deux ouvrages pour réaliser cette petite enquête, il s’agit de  : La rumeur de Chapendu réflexions autour d’une affaire de sorcellerie de Jean-Michel Abt et de Traditions et mystères d’un terroir comtois au XIXe siècle: les Vosges méridionales de Jean Christophe Demard.

Nous nous sommes rendu sur place pour prendre quelques clichés dans ce fameux hameau et dans les alentours. Ci-dessus, des ruines trouvées au hasard au lieu-dit “Pré paris” près du hameau de Chapendu. Ces ruines servent simplement d’illustration car la maison en question ne sera pas dévoilée pour préserver l’anonymat et la tranquillité du voisinage. Merci d’avance de respecter les lieux et ses habitants, sachez que la plupart des protagonistes sont certainement morts. Il peut éventuellement rester quelques anciens qui se souviennent de cette affaire, ou des personnes ayant entendu parler d’elle par bouche-à-oreille.

Pour commencer, il faut que l’on touche quelques mots à propos de la sorcellerie en Haute-Saône. Le département connaîtra les premières chasses aux sorcières vers 1450 alors que le secteur endure en plus la guerre civile. D’importantes affaires de sorcellerie seront jugées dans le pays voisin de Montbéliard (207 procès entre 1554 et 1661). Il faut savoir qu’en Haute-Saône, on ne jugeait pas seulement les humains de sorcellerie mais aussi des animaux. Entre 1627 et 1632, la justice franc-comtoise mène plus de 170 procès, dont plus de la moitié proviennent de la terre de Luxeuil, et particulièrement des villages de Haute-Saône (Anjeux, Bouligney et Cuve). Dans le village de Brevilliers, au 17ème siècle, certains habitants furent accusés de sorcellerie, une femme fut décapitée puis brûlée en 1624, une autre fut brûlée vive en 1655. Ces chasses aux sorcières continueront jusqu’en 1750.

En 1954, dans la région des Milles Etangs, on fait état de plusieurs cas de sorts jetés principalement dans des fermes où les animaux et les paysans dépérissaient.

Si le sort des accusé(e)s de sorcellerie change, les accusations sont toujours omniprésentes, et ce, jusque dans les années 1980. La dernière preuve de la pratique de la sorcellerie dans ce secteur date du 22 juillet 1979.

Revenons à notre affaire de Chapendu : Drôle de toponyme pour un hameau. Certains pourraient y voir un lieu de prédilection où l’on pendait des chats noirs. Justement ! Ce n’est pas impossible ! Car pour conjurer les mauvais sorts, il était courant au moyen âge de pendre un chat au-dessus de la porte d’entrée. Bien Sûr, ce n’est qu’une supposition car l’origine de ce nom reste pour l’instant inconnue.

L’affaire débute en 1918 à l’approche de la fin de la guerre. De nombreux hommes sont partis sur les tranchées. Une rumeur éclate dans ce petit hameau niché sur les hauteurs de la vallée du Breuchin. On dit qu’il y a une maison hantée et qu’il s’y passe des choses étranges presque toutes les nuits. On parle même de poltergeist, voire de pratique de la sorcellerie.

Les vieillards qui ont été interrogés se souviennent : “Dans cette petite maison ne vivaient que des femmes, on y trouvait la grand-mère, la fille et la petite fille”; les hommes n’étaient pas encore revenus des combats. D’après les témoins, on entendait de curieux bruits, la plupart des activités “paranormales” se déroulaient le soir, ou bien la nuit.

On explique par exemple que l’on entendait frapper de grands coups dans les portes (comme des coups de pied), parfois ça venait du grenier, situé à l’étage, on entendait comme des chevaux au galop.

La rumeur s’étend aux villages alentour, et à son apogée, jusqu’à trente kilomètres autour de Chapendu. Les anciens racontent qu’un soir, il n’y avait pas moins de 500 curieux venu observer les phénomènes. Et que certaines nuits, les jeunes se relayaient par groupes pour veiller la nuit entière.

D’autres manifestations se sont déclarées, on note des portes qui s’ouvraient et qui se refermaient sans raison, sans courant d’air et sans l’aide humaine. Des bruits venant de la cuisine et dont l’origine n’est pas été expliqué.

Encore plus étrange… les témoins disent voir une maison en feu, les flammes recouvrant le toit… mais le lendemain, à leur retour, la maison était en parfait état, un peu comme s’ils avaient vécu une hallucination collective.

Maison hantée ? Sorcellerie ? Poltergeist ? Que se passe-t-il vraiment dans cette maison ? Il faut l’avouer, les événements sont plutôt associés à des phénomènes de poltergeist. Ce serait l’une des filles qui détiendrait des pouvoirs maléfiques ! Il faut très vite faire quelques choses, c’est pourquoi l’église envoi un missionnaire. D’après les badauds restés à l’extérieur, quand celui-ci s’exécuta dans sa mission d’exorcisme, ils virent le curé ressortir de la maison, la mine décomposée, et le front en sueur… il transpirait tellement que l’on cru qu’il s’était pris un seau d’eau sur la binette.

Par la suite, les phénomènes ont cessé, mais de cette affaire naîtra une chansonnette populaire créée de toutes pièces par les jeunes curieux : “Et nous irons bien entendu à Chapendu”.

La rumeur s’est transformée en histoire que l’on raconte durant les veillées pour faire peur aux enfants. Soixante ans après l’affaire, Jean-Michel Abt, un psychiatre de la région s’intéresse à l’affaire et écrit une thèse de médecine “La Rumeur de Chapendu”. Il retrouve la principale mise en cause, et relève son témoignage. Tous les ingrédients étaient présents pour amorcer une rumeur (ou une légende), une ferme isolée, une extrême pauvreté et des femmes vivant seules. Ce qui devait déranger les accusateurs pour faire vivre un tel cauchemar à ces femmes.

Ceci n’explique pas les phénomènes surnaturels cités, les visions, les bruits… je vous laisse juge de cette histoire.

Quelques photos : 

Pour s’y rendre : 

Depuis Luxeuil-les-Bains prendre la D6, passer Froideconche, puis continuer direction Raddon-et-Chapendu. Avant d’arriver à Raddon, prendre petite route à gauche direction le hameau de Chapendu.

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  • 20 avril 2024

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2 Comments

  1. Menigoz Patrick
    22 décembre 2021
    Reply

    “C’est bien a Chapendu, mais les faits se sont passés au lieu dit » la Plancenaye « a environ 500 mètres a vol d’oiseau de l’ancienne école de Chapendu. Les faits m’ont été dit par ma mère, qui a bien connu une des personnes en cause et elle était résidente de ce hameau. “

  2. Abt
    20 avril 2024
    Reply

    Une seule source,Jean-Christophe Demard n’a fait que recopier une partie de la thèse de Jean-Michel Abt

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