Le Site Archéologique de Châtel-Saint-Germain en Moselle : Une Histoire Riche et Fascinante
Le Mont Saint-Germain : Un Éperon Barré
Le Mont Saint-Germain, situé à 7 kilomètres à l’ouest de Metz, est un site archéologique d’une grande importance historique. Positionné stratégiquement sur un éperon calcaire à 306 mètres d’altitude, il offre une vue panoramique sur la vallée du ruisseau de Montvaux et le vallon du Tagnon.
Dès notre arrivée, je suis surpris par les trois impressionnants talus que l’on découvre en explorant le plateau. Le premier talus, entouré d’un fossé et enveloppé d’une forêt de pins, est présumé être un vestige de l’époque protohistorique. Les talus suivants témoignent de la présence d’un château féodal imposant de la fin du XIIe siècle. Les vestiges d’une tour et quelques parements de murs sont encore visibles, rappelant la grandeur passée de ce lieu. Aujourd’hui, une forêt de chênes s’étend sur un sol perturbé, marquant l’emplacement de l’intérieur du château autrefois majestueux, maintenant rasé. Il ne reste quasiment plus rien de ce château.
À la pointe du promontoire, on trouve les ruines d’un prieuré d’origine romane qui abritait une petite communauté religieuse dépendant de l’abbaye Saint-Vincent de Metz. L’église et les bâtiments annexes sont construits sur une nécropole mérovingienne, réutilisée et agrandie aux époques ultérieures.
Ce site était stratégiquement important pour surveiller la vallée et la route de Metz à Paris. Les pentes raides au sud, à l’est et à l’ouest du mont formaient une défense naturelle. Il est probable qu’un rempart fortifié ressemblant à une palissade en bois d’origine celtique. Un fossé permettait de renforcer la défense du site. Cette fortification naturelle et artificielle fait du Mont Saint-Germain un site d’une grande importance pour l’étude de l’histoire et de l’archéologie.
Une Occupation Millénaire
Dans la période s’étendant de 1967 à 1991, des investigations archéologiques ont mis en lumière l’occupation continue du Mont Saint-Germain, remontant de la fin du Néolithique jusqu’à l’année 1760. Des artéfacts variés, comprenant des racloirs, des pointes de flèches, ainsi que des haches en silex poli datant de l’ère préhistorique, ont été exhumer, offrant un aperçu captivant sur la vie quotidienne de ces périodes reculées. Les vestiges de l’âge du fer ont également été identifiés, ajoutant une couche d’histoire supplémentaire à ce site.
Entre le IVe et le IIe siècle, un village prospérait sur le promontoire du Mont Saint-Germain. À cette époque celtique, la région était sous l’influence des Médiomatriques, dont l’oppidum était situé légèrement à l’est, aux Hauts de la colline Sainte-Croix à Metz. Ce village, qui était alors le témoin d’une riche culture celtique, occupait une position stratégique, témoignant de l’importance de la région au cours de ces siècles.
Les Médiomatriques, peuple celte de la Gaule antique, ont prospéré entre le VIe et le Ier siècle avant notre ère. Connus pour leurs compétences agricoles avancées et leur rôle central dans le commerce, ils ont laissé une empreinte significative. Leur alliance politique avec d’autres tribus celtes a été cruciale, les plaçant au cœur des enjeux politiques de l’époque. Les Médiomatriques étaient également réputés pour leurs sites religieux dédiés aux divinités celtes. Au fil du temps, des changements politiques et des mouvements migratoires ont influencé leur destin.
L’Époque Gallo-Romaine
Lorsque l’ère gallo-romaine touchait à sa fin, les résidents ont cherché refuge dans une place forte pour se défendre contre les attaques des Alamans et des Francs. Des vestiges de cette période, tels que des fragments de tuiles, du torchis, des pièces de monnaie et de la céramique sigillée d’Argonne, ont été découverts..
La Nécropole Mérovingienne : 370 sépultures
Vers la fin du sixième siècle, durant l’ère mérovingienne, une nécropole a vu le jour dans la partie sud du site. Elle a continué à s’étendre pendant l’époque carolingienne et le Moyen Âge.
À l’époque, ces sarcophages n’étaient pas seulement des réceptacles pour les défunts, mais ils revêtaient également une signification symbolique profonde. Ils étaient conçus pour perpétuer la mémoire des défunts tout en facilitant leur transition vers l’au-delà, conformément aux croyances de l’époque.
Les inscriptions et les motifs artistiques qui ornent ces sarcophages fournissent des indices précieux sur la culture et les coutumes de cette ancienne civilisation. Chaque détail minutieux raconte une histoire, offrant ainsi une perspective unique sur la manière dont ces personnes vivaient et percevaient la vie après la mort.
Ici, les archéologues ont découvert 370 tombes, comprenant des coffres en pierre de forme rectangulaire et des sarcophages sculptés à partir d’un seul bloc de pierre. Un sarcophage mérovingien provenant du sud de la Meuse, qui a été trouvé sur le site, est actuellement exposé aux musées de la Cour d’Or à Metz. Les archéologues supposent qu’une chapelle chrétienne était située près de la nécropole dès le début de la christianisation, bien qu’il n’y ait aucune trace restante. Cette hypothèse est soutenue par la découverte de croix et d’une boucle de ceinture portant l’inscription « Pierre et Paul ».
Ces sarcophages, vestiges du passé, constituent un témoignage éloquent de l’ancienne civilisation qui habitait cette région. Datant de plusieurs siècles, ces tombeaux nous plongent dans l’époque où le Mont Saint-Germain était le lieu de repos éternel de personnes dont la vie reste enveloppée de secrets.
Le Château des Évêques de Metz
Dans les temps anciens, le village constituait l’une des propriétés les plus vénérables des évêques de Metz. Le château des évêques, mentionné pour la première fois en 1070 sous le nom de “castellum” , était un élément central de cette histoire. En 1026, l’abbé Poppon de l’abbaye Saint-Vincent de Metz évoque une église (construite avant celle qui est aujourd’hui en ruines) située dans un lieu-dit appelé “Castels”. Plus tard, en 1140, l’évêque de Metz, Étienne de Bar, confirme que l’abbaye Saint-Vincent est propriétaire de l’église de Saint-Germain de Castello. L’abbaye Saint-Vincent de Metz, érigée au Xe siècle, occupe une place prépondérante dans l’histoire de la ville. Des traces de culte au IXe siècle conduisent à la fondation de l’abbaye bénédictine par l’évêque Thierry Ier en 968. La basilique actuelle, débutée en 1248, arbore un style gothique pur du XIIIe siècle, consacrée en 1376 par l’évêque Thierry de Boppard. Malgré l’incendie de 1752 entraînant des modifications, elle demeure un monument historique, témoignant d’une riche histoire, de la persévérance à travers les âges.
Au cœur des récits historiques, le pape Alexandre III, également connu sous le nom de Rolando Bandinelli, évoque à maintes reprises, à travers quatre bulles, la réputation empreinte de sainteté du prieuré où des prodiges se manifestent régulièrement. Entre les années 1190 et 1220, les évêques Bertram, Conrad de Scharfenberg et Jean d’Apremont se lancent dans l’édification d’une forteresse imposante. Aux premières lueurs du XIIIe siècle, le domaine de Châtel se fusionne harmonieusement avec les terres des évêques de Metz. Cette propriété, associée aux fiefs d’Ars, d’Ancy et de Scy, constitue ce que l’on désigne sous le nom des “Quatre mairies”, un ensemble jouant un rôle crucial en tant que garantie pour les prêts contractés par l’évêque.
La Guerre des Amis
Entre 1231 et 1234, une période tumultueuse connue sous le nom de la guerre des Amis éclate à la suite du décès de la dernière comtesse de Metz, Gertrude de Dabo, fille unique et héritière d’Albert II de Dabo-Moha, comte de Metz. Cette querelle oppose l’évêque de Metz, Jean Ier d’Apremont, à la population messine. Pour défendre ses intérêts, l’évêque fait appel à ses alliés, en l’occurrence le duc Mathieu II de Lorraine et le comte Henri II de Bar. Cependant, les habitants de Metz réussissent à soudoyer le duc et le comte en leur offrant de l’or, les incitant ainsi à se retourner contre l’évêque. Ensemble, avec leurs troupes et les Messins, ils assiègent le château.
Gertrude de Fabo, riche héritière liée aux grandes familles, vécut au XIIIe siècle. Ses trois mariages, dont le dernier avec Simon de Linange, n’engendrèrent pas de descendance. Comtesse après la mort de son père en 1212, elle épousa Thiébaud Ier de Lorraine en 1215, mais sa mort en 1220 laissa Gertrude sans postérité. Contre les intentions impériales, elle épousa Thibaud IV de Champagne en 1220, mais leur union fut brève, se terminant par une répudiation en 1222. Son troisième mariage en 1223 avec Simon de Linange ne laissa pas de descendants. Morte en 1225, Gertrude légua son héritage de manière dispersée, mettant ainsi fin à la lignée des comtes de Metz. Son legs littéraire subsiste à travers deux poèmes lyriques en ancien français, ajoutant une touche artistique à son histoire singulière.
Au cours de ce siège en 1231, les Messins détruisent le village, marquant une page sombre de cette période conflictuelle. Dans une tentative de ramener la paix, l’évêque de Toul, Roger, intervient en facilitant un accord entre les Messins et l’évêque de Metz. Toutefois, en échange de cette paix fragile, les Messins imposent la condition que le château soit démoli, une exigence qui sera effectuée vers l’année 1235. Depuis lors, le château a été transformé en carrière de pierres, illustrant un destin paradoxal où la forteresse autrefois disputée se métamorphose en une source de matériaux de construction au fil des siècles.
Chronologie suposée du site archéologique du Mont-Saint-Germain :
- Néolithique : Occupation du site
- IVe – IIe siècle av. J.-C. (période gauloise) : Une zone d’habitation gauloise est établie sur le site.
- Antiquité tardive : Occupation sporadique du site.
- Fin du VIe siècle et début du VIIe siècle : Forte implantation funéraire sur le site, avec la construction d’une nécropole mérovingienne.
- Fin du XIIe siècle : Construction d’un grand château féodal, dont les vestiges d’une tour et quelques parements de murs sont encore visibles.
- Moyen Âge : Le site servait à surveiller la route qui joignait Metz à Verdun, Reims et Paris..
- Diverses époques : Remaniement du prieuré d’origine romane qui abritait une petite communauté religieuse dépendant de l’abbaye Saint-Vincent de Metz.
- Aujourd’hui : Le site est classé au titre des monuments historiques.
Le Site Aujourd’hui
Aujourd’hui, le site archéologique de Châtel-Saint-Germain offre un aperçu fascinant de l’histoire de la région, de l’époque romaine à nos jours. Il témoigne de l’évolution de la société et de l’architecture au fil des siècles. Un lieu à visiter pour tous les passionnés d’histoire et d’archéologie.
Le Cercle Archéologique et Historique de Châtel-Saint-Germain, une association créée en 1979, travaille pour étudier, préserver et valoriser le patrimoine mis au jour. Ils proposent des visites du site archéologique et de la Salle du Patrimoine.
Sources : Panneaux sur site, Wikipédia, Mairie de Châtel-Saint-Germain, Association le Cercle archéologique et historique de Châtel-Saint-Germain.
Quelques photos :
Pour s’y rendre :
Depuis Metz, prendre la rue de Pont-a-Mousson puis prendre la direction de Moulin-Lès-Metz puis Châtel-Saint-Germain, Prendre la petite route de Verneville, monter jusqu’au parking sur la droite. Le chemin menant au site archéologique commence ici.
A proximité :
- Hêtre des Batailles à Châtel-Saint-Germain
- Chapelle Notre-Dame du Chêne à Lorry-lès-metz
- Les différents groupes fortifiés autour de Metz
- Aqueduc romain à Ars-sur-Moselle
Sur la carte :
Une belle balade culturelle, j’ai beaucoup appris.